ÉDITIONS MIDI-PYRÉNÉENNES MIDI-PYRÉNÉES PATRIMOINE

62. Art déco

10,00

Automne 2022

112 pages

Quelques pages à feuilleter via la liseuse

Qté

1920-1940, un art fragile
Existe-t-il un Art déco en Occitanie ? Si l'on ouvre les histoires de l'architecture française, l'on verra que les auteurs raisonnent à partir d'un corpus francilien, accessoirement lyonnais. Quasiment rien pour le reste du territoire national, même dans les régions dévastées entre 1914 et 1918. Ce mouvement architectural, fût-ce dans ses déclinaisons provinciales, est pourtant fort intéressant. Porté par les arts du décor (comme le faisait l'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925) et la modernité technique (béton, acier et verre), il doit être distingué de l'architecture moderne plus radicale prônée par Le Corbusier et le CIAM, du régionalisme et d'un éclectisme paresseux qui n'en finit jamais. Refusant le « nudisme » des façades, c'est un art à visée totalitaire qui influe sur tous les arts du décor, y compris dans les intérieurs. Toulouse a ainsi connu une pléiade d'ensembliers talentueux tels Alet ou Arbus (comme la Ville avait recruté un remarquable architecte municipal, Jean Montariol, auteur de nombreux groupes scolaires, de logements sociaux, d'une bibliothèque municipale et d'équipements sportifs). Les prix élevés atteints en vente publique d'objets mobiliers ou décoratifs de cette période laisseraient entendre que ce patrimoine n'a pas besoin d'être défendu. Or il est en danger. Un exemple : pour une nouvelle cité administrative à Toulouse, l'État dénature l'Ensica, construite comme école vétérinaire par Charles Le Maresquier, labellisée « Architecture remarquable du XXe siècle », en démolissant un corps de bâtiment, détruisant ainsi les volumes d'ensemble. On ne compte plus les cinémas, les théâtres, les boutiques, les cafés, les restaurants, les garages, les stations-service, les bâtiments industriels démolis ou transformés, alors qu'ils témoignaient, à un rang modeste, de l'engouement d'une société. Il ne s'agit pas ici de pleurer sur les kiosques des stations-service (encore que…) ; il est difficile de sauver une architecture qui a perdu sa fonctionnalité, comme de sauvegarder dans les commerces une devanture ou un magasin vieillis ou passés de mode. Il faut donc trouver une nouvelle fonction, réhabiliter et réaménager. Un très bon exemple dans le dossier de ce numéro, le palais consulaire de Sète, construit avec d'importants moyens dans une volonté de prestige. La Région Occitanie, qui l'a acquis, y loge désormais le parlement de la Mer. Un patrimoine sauvegardé. Une nouvelle vie.